Iran : Le port du voile, un symbole de répression ou de rébellion ?

Si pour certaines femmes, porter le voile est un choix délibéré, pour d’autres, le retirer est une manière de se révolter et de se faire entendre.

Un an après la mort de Mahsa Amini, le peuple iranien et surtout « les femmes continuent de désobéir ». C’est ce que soulève la sociologue franco-iranienne Azadeh Kian. Mahsa Amini étaient une étudiante iranienne, décédée le 16 septembre 2022 à Téhéran. Trois jours plus tôt, elle avait été arrêtée par la police de mœurs pour « port non conforme du voile ». Selon des témoins de la scène, « la police l’a poussée dans un fourgon et l’a frappée, puis l’a conduite au centre de détention de Vozara, à Téhéran ». Sa mort a entraîné le mouvement « Femme, Vie, Liberté », et une partie de la population a commencé à protester contre la répression imposée par le gouvernement iranien, notamment sur l’obligation du port du voile pour les femmes. D’autant plus que le 20 septembre, le Parlement iranien a voté un projet de loi « visant à soutenir la culture de la chasteté et du hijab », qui est donc pour eux un symbole de répression. Les sanctions seront donc encore plus dures. Les femmes continuent donc à se battre, bien que la répression soit sévère surtout à l’approche de l’anniversaire de la mort de Mahsa Amini, puisque « les proches des personnes assassinées, tout comme des journalistes et des défenseur-euse-s des droits humains, sont arrêté-e-s préventivement afin d’empêcher une nouvelle mobilisation». Azadeh Kian précise que les femmes et surtout les jeunes générations continuent malgré tout « de désobéir, par exemple en refusant de porter le voile islamique ». Cet été, nous avons pu assister à de nombreuses manifestations, dans lesquelles les femmes portaient des tenues estivales, des décolletés et qui ne portaient pas le hijab.

« Rejeter le voile, c’est rejeter le régime et l’islam politique au pouvoir »

Dans cette situation, le voile est un symbole de revendication et de rébellion : « Rejeter le voile, c’est rejeter le régime et l’islam politique au pouvoir ». L’objectif est ainsi de faire vaciller le régime, qui est inégalitaire entre les hommes et les femmes, puisque les lois discriminent en particulier les femmes : « Elles ne peuvent pas travailler, sortir du pays ou même dans la rue sans l’autorisation de leur mari. Leur vie vaut la moitié de celle d’un homme » explique Sourour Kasmaï, l’écrivaine franco-iranienne de Femme Rêve liberté. On pourrait avoir l’impression que le mouvement s’essouffle, en raison de la baisse du nombre de manifestations. Mais ce n’est pas le cas. C’est simplement que les contestations continuent sous des formes qui peuvent paraître anodines. Les Iraniennes prennent un grand risque rien qu’en traversant la rue sans le hijab. Près de 50% des femmes ne le portent plus : « Le régime a peur, car il sent que les femmes n’ont plus peur, quelque chose à changé ».

D’autres femmes ont choisi le pouvoir des mots et de l’écriture pour lutter contre l’oppression des femmes en Iran en général, et pas que contre le port du voile obligatoire. Vous vous en doutez, la journaliste et militante iranienne des droits humains, et plus particulièrement des femmes, Narges Mohammadi est l’une d’elles. Elle a pour cela remporté le Prix Nobel de la paix ce vendredi 6 octobre. C’est un moment symbolique, qui a eu lieu un an après la mort de Mahsa Amini, et quelques jours après l’altercation d’Armita Garawand, avec la police des moeurs, dans le métro de Téhéran, qui l’a plongé dans le coma. Cette récompense permet d’envoyer un message fort aux autorités iraniennes : « Elles ne peuvent pas continuer à piétiner les droits des femmes dans leur pays ». Aujourd’hui, à cause de son combat, elle est emprisonnée pour « diffusion de propagande ».

Ce sont ces femmes qui ont osé exprimer leurs opinions qui font vivre le mouvement « Femme, Vie, Liberté ». Elles inspirent le monde et sont elles-mêmes des sources d’inspiration dans la lutte pour le droit des femmes en Iran, que ce soit dans le milieu de la culture, du sport ou encore dans l’éducation des plus jeunes. Ainsi, elles ont trouvé un symbole, le voile, qui représente à leurs yeux la rébellion contre un régime qui lui, se sert du hijab comme d’un moyen de répression.

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