Au cœur de l’actualité mondiale en ce début de semaine du fait de son investiture le 20 janvier, le nouveau président des États-Unis a abrogé un décret signé en 2023 par Joe Biden, dont le but était de mettre un certain cadre aux modèles d’IA. Le développement incontrôlé de l’Intelligence Artificielle devrait prendre place dans les temps qui arrivent, avec une conséquence directe sur l’écosystème médiatique.
Pourquoi ce sujet ?
Ce sujet met au centre de l’attention et lie deux faits majeurs : l’investiture de Donald Trump en tant que 47e président des États-Unis et l’accroissement imprévisible des capacités de l’Intelligence Artificielle. L’un et l’autre auront à terme des conséquences sur la presse mondiale, et conséquemment sur les manières pratiquer le journalisme. Trump, aux côtés des dirigeants des GAFAM, est d’ores et déjà en train de redéfinir la liberté d’expression dans l’espace public des réseaux sociaux. Parallèlement, l’IA bouleverse (et va le faire de manière exponentielle) les pratiques journalistiques et le rapport aux sources.
L’impact sur les métiers du journalisme
Certains journaux ont déjà tenté de faire rédiger des articles par l’IA dans une simple perspective d’expérimentation. Mais au vu des améliorations express de cette intelligence, ne va-t-on pas la voir peu à peu s’introduire dans les rédactions, permettant ainsi une efficacité bien supérieure de réalisation d’articles. Des médias comme Ouest-France ont déjà une charte pour encadrer son utilisation, démontrant par là une volonté d’utiliser l’IA à bon escient. Mais que feraient-ils si les tests s’avéraient concluants, si l’IA faisait preuve d’une efficacité telle que l’emploi d’humains s’avérait désuète ? Nous semblons encore loin (peut-être avec une vision naïve de la situation) du remplacement du métier de journaliste dans les rédactions. Mais qu’en est-il de celui des relecteurs ? La réécriture et la correction de fautes d’orthographe, deux caractéristiques nécessitant du temps avant un effort réflexif, ne peuvent-elles pas être effectuées uniquement par une IA ? N’est-ce pas là un modèle économique bien plus rentable pour les groupes de presse ?
Une réelle menace pour la qualité de l’information ?
Le développement incontrôlé de l’IA signifie notamment une augmentation encore difficile à envisager des capacités génératrices, tant en termes de photos, de vidéos que de textes. L’exemple de Midjourney vient amplifier cette tendance : la création d’images artificielles ultra réalistes devient plus que jamais accessible à tout un chacun. Les rédactions ne vont-elles pas se retrouver submergées par un flux d’informations généré par l’IA immense ? Va-t-on alors assister à la libéralisation ou au chaos informationnel ? Mais au-delà de cette traditionnelle peur de l’innovation et des chamboulements qu’elle pourrait induire, faut-il réellement craindre la prolifération de Fake News à base d’IA ? Pour faire face à cette menace de fausses informations sur le fameux ChatGPT, Le Monde a par exemple passé un accord avec sa société OpenAI pour lui laisser un accès au corpus du journal, le but étant de fiabiliser les réponses produites par l’outil. Mais de telles mesures sont-elles suffisantes pour répondre au problème ? Et au fond, prend-on le problème dans le bon sens : l’IA ne peut-elle pas être au contraire un bouclier contre la désinformation ?
Une confiance du public déjà fragilisée désormais ébranlée
En 2023, seuls 30% des Français affirmaient faire confiance aux médias selon un rapport de l’Institut Reuters. Une relation de confiance qui ne fait que se fragiliser, illustrant ainsi les problèmes sociétaux de l’hexagone. Mais comment cette problématique peut-elle s’atténuer lorsqu’un nombre incalculable de contenus générés par l’IA se retrouvent mis en avant sur les multiples réseaux sociaux, et parfois même sur les principaux médias ? Comment faire lorsque la question des Fake News s’amplifie grandement avec la croissance de l’utilisation de l’IA ? La nécessité de transparence des rédactions quant à leur utilisation de l’Intelligence Artificielle pour produire des contenus paraît essentielle. En effet, l’augmentation de son utilisation doit être accompagnée par une expression claire des intentions pour ne pas laisser le lecteur dans le doute. Il serait aussi intéressant, en parallèle, d’étudier le comportement global des Français quant à l’utilisation de l’IA dans le journalisme : observe-t-on une confiance accrue dans la pratique traditionnelle de la production d’information ? N’est-ce pas là aussi une nouvelle source de polarisation de l’opinion publique déjà découpée en de nombreux morceaux ?
Article réalisé par Téo MAISONNEUVE le 21/01/2025