Ce mardi 17 décembre, le procès opposant l’animateur de TPMP Cyril Hanouna au député de La France Insoumise Louis Boyard se tenait suite aux injures tenues sur le plateau de l’émission en novembre 2022. Ce fut ainsi l’occasion pour les deux partis de revenir sur cet événement qui avait agité les débats dans l’hexagone (malgré une absence du présentateur aussi controversé que populaire).
Pourquoi ce sujet ?
Au vu de la décision de l’Arcom quant à l’avenir défini de C8 et de l’actualité illustrant une certaine proximité entre l’animateur vedette des personnalités d’extrême droite, il me paraît intéressant de se pencher sur le profil de l’une des personnalités médiatiques les plus influentes. De plus, ses liens proches avec Vincent Bolloré, un des nouveaux propriétaires de l’ESJ Paris, démontrent bien une grande concordance avec son activité et le travail journalistique inhérent aux chaînes telles que C8.
Un cas de tensions politico-médiatiques isolé ?
Cette séquence lunaire où un animateur insulte publiquement un élu de la République est pourtant seulement l’arbre qui cache la forêt. La croissance, et pourrait-on dire la mode des débats dans les chaînes d’information en continu et les programmes politiques en « prime time » ouvre la porte à l’expression exacerbée des opinions. Ces exemples de discussions à la limite de l’outrageant entre les politiques et les animateurs/journalistes se multiplient : l’accusation de partialité de Léa Salamé par Jean-Luc Mélenchon en 2017 sur le plateau de L’Emission Politique, point de départ des vindicatives envers le travail du service public, Raquel Garrido, alors députée de LFI, sur Balance Ton Poste fin 2021 face à des chroniqueurs comme Eric Naulleau… Il paraît alors essentiel d’analyser l’essor d’un modèle provocateur et informel de la vie politique dans les médias.
Quelle délimitation juridique entre travail journalistique et injure ?
A travers ce cas évident d’insultes envers un responsable politique, une question se pose alors pour les exemples plus subtiles : à partir de quel niveau de provocation journalistique considère-t-on l’événement comme un cas d’injure ? Si la tentative de chambouler les positions d’une personnalité politique sur un plateau fait systématiquement suite à un recours en justice, le travail journalistique ne s’en voit-il pas contraint ? Cette menace constante n’empêche-t-elle pas de poser librement des questions ? Un exemple concret de « procès bâillon » ayant pour but de gêner le travail journalistique a été mis en évidence cette année : suite à une enquête du média Rue89 sur ses jets privés, Jean-Michel Aulas, l’ancien puissant président de l’Olympique Lyonnais, a lancé une plainte en diffamation contre les journalistes à l’origine.
Le rôle essentiel de l’Arcom dans le fonctionnement de l’espace médiatique télévisuel
Les multiples cas de débordements sur le plateau de Touche Pas à mon Poste ont finalement poussé l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, entre autres facteurs, à fermer la chaîne C8 en février prochain, après plus de sept millions d’euros d’amendes cumulés en huit ans. Une décision qui ne manque pas de faire réagir Cyril Hanouna, dénonçant un « harcèlement » de la part de l’Arcom. Pourtant, l’organisme succédant au CSA a pour rôle premier de mettre des règles permettant de garantir la liberté d’expression dans de bonnes conditions. Il est donc intéressant d’aborder les conditions dans lesquelles ce choix a été réalisé, mais aussi l’impact sur les salariés de C8, avec en première ligne son émission phare. Alors l’Arcom représente-t-elle le gendarme nécessaire au bon fonctionnement de l’univers médiatique, ou au contraire un acteur « à deux poids deux mesures », comme le dénonce Cyril Hanouna.
Article réalisé par Téo MAISONNEUVE le 18/12/2024