Dix ans après les attentats contre Charlie Hebdo, revenons sur les questions soulevées par cette attaque.

Nous sommes le 7 janvier 2015. Le journal Charlie Hebdo vient de publier son 1177ᵉ numéro. Au même moment, il subit un attentat aux revendications islamistes, le premier et le plus meurtrier de tous les attentats que la France connaîtra en janvier 2015. Aux alentours de 11h30, les deux terroristes entrent dans les locaux qui abritent la rédaction du journal. Ils assassinent 12 personnes, dont 8 membres de la rédaction.

10 ans plus tard, d’après une source proche de Charlie Hebdo, RTL rapporte que la rédaction se trouve dans un bâtiment sous haute protection : portes blindées, plusieurs sas de sécurité, création d’une panic room, aucune fenêtre donnant sur la rue. À la suite de ces attentats, de nombreux Français se mobilisent dans la rue, brandissant des stylos au-dessus de leur tête au nom de la liberté d’expression, en soutien aux membres de la rédaction encore en vie et en hommage à ceux décédés pendant les attaques.

Hier, le 7 janvier 2025, nous avons passé la date anniversaire des 10 ans des attentats de Charlie Hebdo. À cette occasion, le journal a publié une édition spéciale, à la couverture jaune, intitulée « Increvable ». Les médias sont en boucle sur le sujet. De ce fait, élèves en école de journalisme, nous serons également en boucle sur le sujet.

La liberté d’expression est un droit sacré, mais pas absolu en France, comme le stipule l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « Elle s’arrête là où elle commence à nuire à autrui. » L’atteinte à cette liberté le 7 janvier 2015 révolte, scandalise et endeuille la société française. Mais alors, pourquoi la France et les Français accordent-ils une si grande importance à cette liberté, constituée comme un droit pour l’humanité, un élément essentiel pour maintenir la démocratie française ?

Tout d’abord, comme le mentionne un article publié dans Ouest France, il s’agit d’un combat de longue haleine. Ce combat commence au moment de la Révolution française, le 14 juillet 1789. Les députés de l’Assemblée constituante l’inscrivent par la suite dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, votée le 26 août 1789. De nombreuses lois viendront tenter de renforcer ce droit tout en lui attribuant un cadre strict : en 1881, une loi protège les propos critiques mais sanctionne les injures ; en 1939, le décret Marchandeau interdit les attaques raciales et religieuses, etc. Toutes ces lois participent à la construction d’une liberté d’expression « à la française ». En se distinguant des États-Unis, elle tolère la critique des croyances mais sanctionne les attaques contre les individus.

Les attentats de Charlie Hebdo soulèvent une autre question : peut-on rire de tout ? Peut-on tout dire au nom de la satire et de la liberté d’expression ? Boris Cyrulnik, neuropsychiatre, et Bruno Humbeeck, professeur de psychopédagogie, répondent à ces questions dans un podcast publié par Radio France. En répondant à des mises en situation comme : « Peut-on rire à un enterrement ? » ou « Peut-on rire d’Auschwitz ? », ils expriment que, selon eux, nous pouvons rire de tout, à condition que cela respecte une certaine morale et ne touche pas aux points sensibles de la personne avec qui nous rions ou aux nôtres.

Nous pourrions conclure en rappelant que le rire constitue un canal de communication essentiel, partagé par l’ensemble de l’humanité. De ce fait, nous pourrions imaginer que le rire ouvre les portes à la réflexion en dépassant les tabous.

Mémona Kowalczyk

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