Un journaliste français arrêté par l’armée israélienne en Syrie 

J’ai choisi de traiter cet article de veille sur un article de l’Humanité sur l’arrestation de Sylvain Mercadier. C’est l’un des seuls articles qui portait sur le sujet dans mon flux Inoreader mais elle permet de soulever de nombreuses questions. En effet, ce n’est pas la première fois que ce genre de situation arrive. Ces situations sont mêmes de plus en plus fréquentes malheureusement à cause des conflits qui se jouent à de nombreux endroits du monde. En 2012, la Dépêche avait déjà abordé le sujet lors de la mort d’un journaliste au cours d’une mission en Syrie. Le média Reporters Sans Frontières (que je n’ai pas réussi à incorporer dans mon flux Inoreader) alerte sur ces dangers et met en avant les journalistes enlevés, kidnappés ou tués au cours d’une mission.

Que s’est-il passé ?

L’annonce à été faite par le biais de X par le rédacteur en chef adjoint du service international du magazine d’actualité, Quentin Müller. Sylvain Mercadier a été arrêté par l’armée israélienne ce mercredi 08 janvier en Syrie, plus précisément à la frontière de la région du Golan, avant d’être retrouvé et relâché en fin de journée. Rappelons que le plateau du Golan est une des parties occupées par Israël depuis 1967 étant donné sa place stratégique importante dans le contexte du conflit israélo-arabe. Nous pourrions d’ailleurs traiter cela plus longuement si on se penche sur des articles comme celui de Médiapart sur le lien entre Israël et le Golan mais on sortirait de la dimension de la place du journalisme dans ce sujet.
Pigiste pour le média Marianne, “Le journaliste, ainsi que l’avocat syrien Mohammad Fayad qui l’accompagnait, auraient été battus, menottés et les yeux bandés avant d’être emmenés on ne sait où” selon le média qui reprend les informations de Marianne. L’Humanité reprend les propos d’Anne Tuaillon, Présidente de l’Association France Palestine Solidarité « Israël ne recule devant rien pour empêcher les journalistes de faire leur travail. Il assassine les journalistes palestiniens et arrête les étrangers » mais ne donne pas les raisons de cette arrestation.

Libération nous en informe un peu plus. Sylvain Mercadier était sur le plateau du Golan pour couvrir l’avancée des troupes israéliennes en territoire syrien. Le journaliste syrien Yousuf Gharibi, témoigne : “ Sylvain négociait la permission de filmer les forces israéliennes qui arrivaient dans le village. Il portait un gilet pare-balles ‘’Press’’». Malgré ça, quand les soldats ont été à sa hauteur, ils ont confisqué son matériel, puis l’ont battu et traité de mercenaire”. Selon un porte-parole de l’armée israélienne, le pigiste se serait approché des soldats à plusieurs reprises par le passé. Il l’a refait aujourd’hui. Ils l’ont arrêté rapidement, l’ont interrogé, puis l’ont relâché”.

Quels angles possibles ?

Une volonté de poursuivre une logique d’un blackout médiatique de la part d’Israël.

La déclaration du porte parole israélien que nous venons de voir, m’a fait poser plusieurs questions. Comment cela peut-il être permis, voir accepté, par les gouvernements alors qu’il s’agit concrètement d’un journaliste qui ne faisait que son métier ? Dans quels buts l’armée israélienne arrête-t-elle un journaliste pigiste ?

On parle d’un blackout médiatique concernant Israël. Le gouvernement contrôle les habitants et les informations notamment des médias étrangers et l’histoire de Sylvain le montre parfaitement. Le média Business le définit comme “une pratique par laquelle les médias décident délibérément de ne pas couvrir ou de minimiser la diffusion d’informations sur un événement spécifique. Les gouvernements autoritaires ou répressifs peuvent restreindre l’accès à l’information et contrôler les médias pour éviter la diffusion d’informations qui pourraient compromettre leur pouvoir ou perturber l’ordre établi.”

Cet article m’a directement fait penser à une phrase que j’avais entendu de Dorothée Olliéric dans une interview pour Public Sénat où elle parle des risques des journalistes notamment reporters de guerre, correspondants ou encore envoyés spéciaux qui sont aujourd’hui, et ce de plus en plus victime d’un gouvernement ou la cible dans des conflits qu’ils couvrent. La reportère de guerre disait ces mots très justes : “aujourd’hui les conflits ne sont plus les mêmes, les risques changent, aujourd’hui en Ukraine ce sont les drones, le champ de bataille est transparent et ces menaces mettent en péril notre couverture des terrains de guerre.”

Les journalistes au centre d’enjeux géopolitiques

On peut rapprocher cette histoire d’un rapport de RSF sur le lourd bilan de 2024 que j’ai trouvé des recherches complémentaires sur le média Blast concernant l’armée israélienne et le journalisme. D’abord, l’enquête rappelle qu’Israël a mis en place  “un black-out médiatique et l’interdiction d’accès au territoire pour les journalistes étrangers” dans  “la région la plus dangereuse au monde pour les journalistes, où le journalisme même est menacé de disparition ». Thibaut Bruttin, directeur général de RSF affirme : “Les journalistes […] ne sont pas en prison, des régimes les y ont jetés ; ils n’ont pas disparu, on les a enlevés. Ces crimes, souvent orchestrés par des gouvernements ou des groupes armés, bafouent le droit international et demeurent trop souvent impunis. La fatalité ne doit jamais triompher. Protéger ceux qui nous informent, c’est protéger la vérité.” Les journalistes deviennent alors des cibles lors de ces guerres, une idée d’ailleurs au centre des recherches de Philippe Boulanger dans Mondialisation, rivalités d’influence et médias (cairn) sur la géopolitique des médias.


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